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Développer une carrière artistique : un choix des enfants ou des parents ? 

Un billet d'humeur par Emma Clavie

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Mener une carrière professionnelle quand on est enfant, ça implique aussi les parents. Gérer l’argent, l’emploi du temps et l’image sont des choses qui ne peuvent être réalisées par l’enfant seul lorsqu’il est mineur. Les parents interviennent alors dans de nombreux choix, quitte à prendre parfois trop de place.  

 

À à peine huit ans, Tom* est suivi par plus de 1000 followers sur Instagram. Même si treize ans est l’âge minimal requis par Instagram pour pouvoir se créer un compte, de nombreux enfants font écart à la règle. Pourtant, ce n’est pas Tom qui, plusieurs fois par semaines, publie des photos et vidéos de ses auditions, de ses cours et de son quotidien. Ce n’est pas lui non plus qui répond aux messages qui lui sont envoyés. Tom existe bel et bien mais ce n’est pas lui qui se cache derrière son compte Instagram.  

Dans ce cas précis, il ne s’agit pas de catfishing, donc le fait de fabriquer une fausse identité en ligne pour tromper quelqu’un dans une fausse relation. La réalité est tout autre puisque c’est la mère de Tom elle-même qui alimente ce compte Instagram. La raison : développer la carrière de son fils acteur, chanteur et danseur. D’après la mère, Tom a un droit de regard sur tout ce qui est posté. Mais à huit ans, en est-il réellement conscient ?  

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Un cadre légal aux contours flous  

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Aux Etats-Unis, un cadre légal encadre la protection de la vie privée des enfants en ligne : la COPPA (Children’s Online Privacy Protection Act). Cette loi de 1998 concerne la collecte d’informations sur les mineurs de treize ans. Elle précise la nécessité d’un consentement accordé par l’un des parents et les responsabilités des webmestres (personne responsable d’un site web, de sa conception et de sa maintenance) pour protéger la vie privée des moins de treize ans.  

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Si l’on se réfère à cette loi, Tom pourrait avoir la propriété exclusive de son image sur les réseaux d’ici cinq ans. En attendant, c’est sa mère qui a le droit légal de gérer son compte Instagram pour devoir éviter de compromettre son image, son intérêt et sa vie privée.  Le cadre légal n’aborde cependant pas le concept de consentement ni la capacité de discernement chez l’enfant. En effet, l’entièreté de la loi se base sur le devoir des parents de protéger l’identité virtuelle et la vie privée de leur enfant.  

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«â€¯Ce double rôle des parents […] offre aux enfants peu de protection au fur et à mesure que leur identité en ligne évolue. Il existe donc une forme de conflit d’intérêts, car les enfants pourraient un jour être mal à l’aise avec des informations qui ont été, des années plus tôt, partagées par leurs parents sur Internet »

-  professeur Stacey B. Steinberg à l’Université of Florida Levin College of Law, auteure du livre «â€¯Growing up shared ».  

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La rétroaction positive (abonnements, likes, …) reçue grâce à ce compte Instagram semblerait être bénéfique pour Tom puisqu’elle permet de partager ses performances artistiques et de développer sa carrière. Toutefois, en a-t-il réellement fait le choix  ?  

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Une histoire de famille  

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Avec une mère professeure de flamenco et un père diplômé en musique, Tom baigne depuis toujours dans l’industrie artistique. Ses parents ont donné la priorité à la musique en lui offrant des cours de piano, de chant et de danse. En somme, tout ce qui lui permettait de se développer potentiellement dans cette industrie. Chose qui a fonctionné puisque Tom a commencé les auditions grâce aux conseils de son professeur de chant.  

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C’est donc en suivant le parcours de ses parents et en acceptant une opportunité que Tom s’est lancé, il y a maintenant deux ans, en tant que professionnel dans l’industrie. Et depuis, beaucoup de choses ont changé : un emploi du temps chargé, l’école à la maison, les nombreux déplacements,…  

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À l’heure actuelle, il est impossible de savoir ce que Tom pense réellement de sa vie régulée par les auditions, les leçons et les spectacles. Du plus loin qu’il se souvienne, c’est ce qu’il a toujours connu. Mais une chose est sûre, Tom reste malgré tout un enfant dans un monde d’adultes. 

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*Nom d'emprunt utilisé pour préserver l'anonymat de notre source.

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